AVIATOR et l’hydravion.

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Paris, le 1er Février 2005.

Bonjour à tous. Nouveau sur ce forum, j'adresse mes salutations aux autres membres et à ceux qui ont la courtoisie d'en assurer la gestion, au premier rang desquels Bernard Chabbert, initiateur et créateur de ce site.

Je sors moi aussi du film Aviator. Pour tous ceux qui l'ont vu ou le verront bientôt, je désirerais mettre l'accent sur les images qui m'ont frappé par leur beauté. Ma réaction est subjective (déformation professionnelle).

Mais enfin, comment ne pas se réjouir de la place qu'accorde ce film, outre à la dimension psychologique d'Howard Hughes, au côté artistique et visionnaire du personnage.

Ce côté "ARTISTE", metteur en scène de sa propre vie, est notamment très bien rendu dans les séquences HYDRAVION, qui constituent (enfin, ont constitué pour moi), parmi les autres séquences aéronautiques, celles qui dégagent le plus de poésie, de sens de l'esthétique :

Cela commence avec cet hydravion (ce pourrait être un Sikorski, corrigez moi, comme celui que se fit construire Osa Johnson, connu sous le nom de l'"arche d'Osa", voir le film rétrospective "Les amants de l'aventure", disponible en cassette, avec les magnifiques images de l'Afrique ou de Bornéo prises en hydravion), un hydravion à coque (bateau volant), qui se pose gracieusement sur une plage et vient, telle une barque, accoster sur le sable (qui connaît le verbe correct pour " beacher " ?). Le pilote sort, très dignement et très sportivement marche sur le nez de l'appareil et saute sur le bord de la plage, totalement indifférent au sort qu'il fait subir à son revers de pantalon. Il invite, (je devrais dire "enlève") Catherine Hepburn et lui propose de l'emmener faire un 9 trous...

Qui d'entre nous n'a rêvé d'enlever la Dame de ses pensées en coursier volant. Seulement voilà, à moins de draguer une contrôleuse d'ADP (il y en a de très très jolies, aussi vous prierai-je de pardonner le présent écart de langage), ce n’est pas avec le Robin du Club que l’on peut impunément atterrir sur le chemin de remembrement qui longe la résidence secondaire de sa belle en pleine campagne de Beauce. Quoique, à ce sujet, il faut savoir que durant de longues années, l’atterrissage en campagne était LEGAL dans ce pays, jusqu’à ce que, bien sûr, on l’interdise, quel dommage, heureusement, il nous reste l’ULM …. Et l’hydravion. L’hydravion, sous certaines réserves, " qu'on se le dise ", permet, AUJOURD’HUI, de procéder EXACTEMENT comme Howard Hugues. Je me permets, en guise de contribution à ce site, de vous inviter à visiter la page suivante, qui correspond, de manière totalement légale, à une scène bien comparable à celle du film. Il s’agit de photos d’amerrissage effectué dans l’enceinte d’une des dix hydrosurfaces référencées en Corse du Sud (voir lien ci-dessous)

Revenons à Aviator : Comment avez-vous trouvé la séquence de vol nocturne, toujours en hydravion, dans le ciel de Los Angeles ? Quelle fluidité, quelle douceur ! L’atterrissage de nuit (c’est un amphibie) sur le golf ? Ouaouh…. Pas forcément à conseiller, mais quelle classe….

L’un des clous du film, que j’ai d’autant plus apprécié qu’il m’a ramené au souvenir d’un très ancien check-flight en Albatross, me semble être ce vol inaugural en " Hercules ". C’est vrai, tiens, le C130 porte le nom de l’hydravion géant imaginé et conçu par Howard Hugues. Il est cependant, si vous me le permettez, à des années lumière en terme de poésie. J’avais appris il y a longtemps, à la lecture d’un excellent livre " Hydravions " que je vous recommande, que l’hydravion géant d’Howard Hugues (sept cents passagers…) n’avait fait qu’un simple vol en hydroplanage, " sur le redan ". D’autres disaient " en effet de sol ". Merci à AVIATOR de nous le faire voir en situation de vol effectif. Là aussi, aidez-moi de vos lumières ! Quelqu’un a-t-il un compte rendu de ce vol d’essai, notant en particulier l’altitude atteinte. Inférieure ou supérieure à l’envergure. Dans un cas, les puristes parleraient d’un écranoplane et non d’un hydravion, n’est-ce pas, aussi, tentons de voir les choses avec suffisamment de finesse. Autre question, puisque nous sommes sur un forum : Est-ce que des études ont été faites pour, a posteriori, déterminer si cet appareil, " tel quel ", aurait pu effectuer un véritable vol en croisière ?

Si oui, quel eussent été ses spécifications : autonomie, charge utile, etc.

Si non, où était le problème ? Sous-motorisation (auquel cas, vous voyez où je veux en venir, compte tenu des performances des turbines et turbo-fans actuels, pourrait-on envisager une remotorisation " virtuelle " ?) ? Ou autres problèmes, plus complexes à résoudre, tenant au design même de l’engin.

Le but de tout çà ? Rêver, bien sûr. Rêver à un A4XX qui tiendrait du bateau volant et pourrait, en un temps record, voler au secours de populations côtières anéanties par un tsunami, une fois une zone d’amerrissage " sûre " sécurisée en bordure de côte.

Sans trahir de secret, les lecteurs assidus d’Air et Cosmos et de la Revue de l’Armement sont conscients de ce que l’Europe, en concurrence avec les Etats-Unis, recherche depuis de longues années " l'avion de transport à tout faire géant idéal ". Je vais rechercher la spécification de besoin figurant dans la loi de programmation militaire, si vous le voulez… Alors, si on lui donnait une petite chance, à Howard, de voir son bébé grandir ?

Alors bon, tout çà ensemble, je me dis qu’on pourrait peut-être rebondir sur le formidable impact médiatique d’AVIATOR (car ce film va fonctionner, croyez-moi, il est superbe), se re-pencher, aujourd’hui, sur le projet chéri d’Howard Hugues. Ne se trouve-t-il pas, curieusement, à l’intersection de trois dossiers dont l’importance n’est plus à démontrer :

  1. " 3 ième aéroport-nuisances ",
  2. " desserte des populations côtières isolées en cas de cataclysme ",
  3. " capacité d'intervention rapide d'un très gros porteur militaire en régions côtières et fluviales ".

En conclusion, merci donc à Bernard Chabbert pour son magnifique article sur ce film.

Merci à Martin Scorcese d’avoir su saisir en quelques images l’esthétique du vol en hydravion. Pour avoir eu la chance de piloter un Albatross, hydravion à coque dont la taille est comparable à celle d’un Canadair, j’admets que la scène du vol inaugural du Hercules est loin d’être parfaite : où est le passage sur le redan, où sont les " claques " que l’on ressent sur une houle longue (le clapot quant à lui ne procure pas du tout l’effet visualisé dans le film), mais après tout, soyons tolérants : d’abord, même ceux d’entre nous qui ont eu la chance de voler sur le plus grand hydravion actuellement en service (voir liens plus bas) ne peuvent présumer de ce que fut le comportement réel du Hercules lors de son vol d’essai. A l’inverse, quelles images, quelle beauté, quelle sérénité lorsqu’enfin l’oiseau géant parvient à prendre l’air. Il faut avoir bataillé avec la houle, sué sang et eau, failli renoncer cent fois avant d’arracher un hydravion à coque d’une onde peu clémente pour comprendre l’impression indicible de délivrance qu’éprouve Howard Hugues quand son enfant prend l’air.

Puisse le film AVIATOR , (conclusion en forme de vœu pieux), par son impact auprès de nos concitoyens et de leurs représentants (députés, administration) contribuer à la renaissance de l’hydraviation dans le pays qui l’a vu naître, à l’instant même où l’Europe dévoile, en la personne de l’A380, toute l’ingéniosité et la maîtrise d’œuvre aéronautique dont elle peut se targuer.

Xavier de Pramont

Hydravion-Club de France

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